Épisode 3 : Bangui, mon retour aux sources

Pour faire très simple, ce voyage a Bangui m’a permis de confirmer mon projet d’industrie des métiers de la mode mais ça a été un uppercut qui m’a terrassée, et dont j’ai mis un certain temps pour m’en remettre. J’ai traversé toutes les étapes du deuil. Et encore… je ne suis pas certaine d’avoir complètement passé la dernière étape de l’acceptation !

Comme je vous le confiais dans « Épisode 1 : Bangui, mon retour aux sources« , j’ai commencé une introspection, avant le voyage. Cependant, si je dois me montrer complètement transparente, l’introspection a commencé il y a 3 ans, avec l’arrivée de ma fille et s’est terminée, avec le voyage à Bangui. Il me restait des derniers tiroirs que j’avais peur de toucher.

Ce voyage à Bangui aurait pu tuer la totalité du peu de naïveté qu’il me reste et il en est hors de question ! Je sais qu’on ne vit pas dans un monde de bisounours, mais les choses que je sais aujourd’hui dépassent mes capacités de compréhension.

Je vous confiais également dans « Épisode 2 : Bangui, mon retour aux sources« , que c’était compliqué de recueillir les propos de certains habitants, vis à vis de la France. Cela m’a tellement brisé le coeur, de voir que la patrie qui m’a vu venir au monde, à de profonds ressentiments concernant le pays qui m’a faite devenir cheffe d’entreprise, en partant de rien.

Je ne sais pas la totalité de ce qu’il s’est passé sur le territoire, pour en être arrivé à ce point de désamour entre la Centrafrique et la France, mais il serait trop facile de jeter la pierre à l’un ou a l’autre. Comme dans toute relation, même s’il est difficile de l’accepter, si il y a rupture, c’est que chacun a sa part de responsabilité.

Quand il y a conflit, il n’y a pas de gentil, ou de méchant, seulement deux points de vue qui s’affrontent.

Mieux vivre avec la psychologie positive

Pour tout vous dire, l’espace de quelques instants, j’ai failli perdre foi en Dieu et en l’humanité. La chose qui m’a faite tenir, c’est de revenir à mes valeurs, à l’aide de la psychologie positive.

J’ai rencontré lors de l’évènement « Révèle la Marianne qui en toi » organisée par Nacera ROSZCO, Sophie DIENG et moi-même, dans le cadre de la journée internationale de la femme 2022, la psychologue et sophrologue Djahida Tanem. Autrice du livre « Des clés pour mieux vivre« , dont je lui ai pris un exemplaire et que j’ai rapidement dévorer. Ce qui m’a fait découvrir un test pour identifier ses forces de caractère, afin de maintenir une psychologie positive, test que j’ai bien entendu fait et qui va me servir à mon retour de Bangui.

Les forces qui m’ont permises de me remettre debout sont le discernement, et le courage et la vaillance.

La Centrafrique et la France : deux pays pas si différent au final

C’est grâce à la psychologie positive, que je me suis rendue compte qu’a Bangui, j’y ai rencontré un peuple qui, malgré des conditions de vie qui me semblent difficile, sont des hommes, des femmes et des enfants complètement épanouis. Ils ont les mêmes problématiques économiques et sociétales notamment sur l’égalité des genres et des chances qu’en France.

“Forum de l’emploi et de l’entrepreneuriat au féminin”, organisé par Grenoble Alpes Métropole au Stade des Alpes.

Par exemple, un chef d’entreprise « misogyne » soucieux de ses salariés, et qui peine à payer ses charges, des artisans qui n’ont pas le temps pour terminer leurs commandes, une prof qui manque de ressources et qui s’inquiète pour l’avenir de ses élèves, des artistes qui souhaiteraient vivre de leurs arts, et rêvent d’être vus par le monde entier.

Et surtout ! Des adolescentes coquettes, qui se chamaillent pour le beau gosse du quartier. Ah ! Qu’est-ce qu’il en brise des cœurs celui-là… Moi-même ayant été une de ses victimes.

Je me suis alors posée ces questions, une fois passé le cap de l’acceptation :

Qu’est-ce que je peux faire à mon niveau ?

Faire aboutir mon projet dans la mesure des mes moyens. Ça va être un challenge, je le sais, mais après tout, je ne suis pas toute seule. J’ai tout un réseau, que j’ai acquis ses 10 dernières années et qui sera prêt à me soutenir dans cette aventure.

Qu’est-ce qui me freine, depuis que l’idée a germé en 2017 dans mon esprit, pour amorcer mon projet ?

Pour je-ne-sais quelle raison dans mon esprit, je voulais amorcer le projet pour mes 40 ans. Soit disant pour une question de légitimité, mais ce n’était qu’une excuse. La légitimité, je l’ai déjà acquise depuis de nombreuses années.

Ce sont les derniers tiroirs que j’ai ouvert en allant à Bangui, qui vont me permettre de répondre à la question. J’ai simplement besoin de me sentir en sécurité, ni plus ni moins. Et pour ça, il a fallu aller rassurer la petite fille traumatisée que j’étais.

Je peux vous assurer que ça n’a pas du tout été une partie de plaisir ! Je crois qu’il n’y a pas plus dur au monde, que de s’affronter soi-même. Malgré la difficulté, ça a été une libération. J’ai enfin accepté ma sensibilité, sensibilité dont j’avais tendance à ne pas assumer. Dans la culture africaine, et je dis bien africaine pas uniquement centrafricaine, on n’est pas dans la démonstration de ses émotions, et c’était d’ailleurs une source de questionnement enfant et encore aujourd’hui.

Je ne comprenais pas pourquoi j’avais jamais vu mes grands-parents s’embrasser, ou se tenir la main. Ça parait bête comme question, mais encore aujourd’hui ça m’interloque. Et pourtant, ma mère m’a répondu, mes grands-parents l’on également fait. Leurs réponses n’ont pas suffi. J’ai peut-être une vision trop occidentale sur le sujet, allez savoir…

En y repensant, je pense que ma mère a très vite comprit, que j’étais très sensible, parce qu’elle m’a toujours dirigée vers des activités artistiques comme le théâtre, la peinture, le chant… Au détriment d’activité sportive. Et puis, elle a toujours pris le temps de me faire parler, dès qu’elle sentait que je n’étais pas bien, quitte à me forcer la main, quand j’étais trop braquée, pour extérioriser.

J’ai compris à 31 ans (il était temps…), aux vues de mes capacités, qui sont très logique, si je n’avais pas cette sensibilité, je serais dans l’incapacité de comprendre les nuances de la vie. J’ai une amie d’enfance qui dit tout le temps de moi :

« De toute façon, toi, t’es une fragile ++»

Et elle a raison ! Oui, je suis facilement émue et émerveillée pour un rien, et alors ? Ce n’est pas la fin du monde. Je peux voir 10 fois ou 100 000 fois, un coucher de soleil, au même endroit à la même heure, je resterai toujours ébahis, j’aurai certainement envie de verser une petite larme, pour ce magnifique spectacle qu’offre la nature. Après tout, il en faut peu pour être heureux.

Si certaines personnes pensent que ça fait de moi une personne fragile, libre à elles. Je sais que c’est très loin d’être le cas.

Je me sens enfin pleinement alignée avec moi-même, et je suis prête à relever le challenge de bâtir toute une industrie en partant de rien. Je sais que ça ne va pas être simple, mais il y a une chose que je sais, c’est que je vais faire ce que je peux pour y parvenir. Parce que je n’ai qu’une parole et quand je veux quelque chose, je m’en donne les moyens, un point c’est tout.

Regardez mes pays !

Mon projet, j’ai décidé de l’appelé “Âla bâa ködörö tî mbï !” ce qui veut dire “Regardez mon pays !” parce qu’ils méritent d’être regardés à travers mes yeux respectivement, pour toutes les richesses qu’ils contiennent.

À travers ce voyage, j’ai redécouvert mon pays natal, je dirai même découvert. J’ai appris, peu de temps avant de prendre l’avion, qu’une partie de la 2e plus grande forêt au monde, la Forêt du Bassin du Congo, fait partie du territoire de la République Centrafricaine. J’ai trouvé ça complètement fou d’apprendre cette information à mon âge, même ma mère n’était pas au courant, c’est pour dire !

J’aimerais réellement faire rayonner mon pays maternel la Centrafrique, par le biais de ce que m’a appris mon pays d’adoption la France, c’est-à-dire l’industrie des métiers de la mode. Quand on parle de mode, on a tendance à voir uniquement le coté superficielle alors que c’est bien plus profond que cela. La mode, c’est la confluence de plusieurs domaines artistiques, il conjugue le dessin, la musique, le théâtre… Mais également la technique et la discipline. Elle est littéralement le reflet de toute une société. S’habiller, c’est aussi s’exprimer.

Je vous avoue que j’ai choisi la mode, pour le coté créatif et plus particulièrement, le développement de produit, mais aussi par commodité. J’avais les capacités pour devenir ingénieure, cependant, j’avais déjà suffisamment de barrière à abattre.

La mode, c’est un domaine que je trouve complètement ouvert à la diversité, il suffit de vouloir exceller, le reste se fait tout seul. La preuve en est, avec mon parcours. Qui aurait dit que j’allais avoir des clients partout en France, en seulement 5 ans d’activité ? Tout en sachant que je fais très peu de communication et que je suis à Grenoble ?

Industrie des métiers de la mode à Grenoble

 Projet d’industries des métiers de la mode

Depuis, j’ai parlé de mon projet “Âla bâa ködörö tî mbï !” à mon réseau, et qui est prêt à me suivre dans cette aventure, qui va certainement bouleverser la vie des prochaines générations. Auriez-vous imaginé une seule seconde, qu’une jeune femme de 31 ans, veuille développer toute une industrie ? Pas moi et pourtant, c’est ce que je souhaite faire.

Denise CARTER et Laurent PREVOST

en compagnie de Monsieur le Préfet de l’Isère au
“Forum de l’emploi et de l’entrepreneuriat au féminin”, organisé par Grenoble Alpes Métropole au Stade des Alpes.

Mon équipe et moi-même, sommes conscientes des enjeux qui en découlent (économique, sociétale, environnementale, ect.) et sommes activement à la recherche du principal partenaire. Celui qui sera aligné à nos valeurs, pour faire aboutir le projet “Âla bâa ködörö tî mbï !” qui englobe bien plus qu’un simple atelier de confection. Qui sera un pont entre la France et la Centrafrique. L’objectif principal est de former des jeunes filles et des femmes aux métiers de la mode.

Si vous souhaitez en savoir plus afin soutenir le projet “Âla bâa ködörö tî mbï !” par n’importe quel biais, ou simplement suivre cette épopée, c’est par ici : profil LinkedIn Denise Carter

N’hésitez pas à partager un maximum autour de vous, pour que nous puissions atteindre les bonnes personnes, et faire aboutir ce projet.

En attendant, à vos ciseaux et bon voyage !